Les femmes en implantologie : 2/3 Femme, mère ou professionnelle

Dans cette série de 3 épisodes d'Entretien avec un dentiste, il est question d'un sujet qui peut soulever de nombreux débats : la place des femmes en implantologie. Ces épisodes à plusieurs voix mêlent témoignages et commentaires d'experts. Comment se sont-elles fait une place ? Comment ont-elles allié vie professionnelle, personnelle et maternité ? Comment penser le futur sur cette question ? Nous avons tenté d'y répondre ensemble.

Pour ce sec­ond épisode de notre série sur la place des femmes chirurgiens-den­tistes en implan­tolo­gie, nous par­lons cette fois-ci de grossesse et de mater­nité. Com­ment la parental­ité a‑t-elle trou­vé sa place dans les études et la car­rière et de nos pro­fes­sion­nelles ? Quelle rétro­spec­tion font-elles aujourd’hui sur le temps qu’elles ont pu accorder à leurs enfants ? À quels argu­ments les jeunes mères se retrou­vent sou­vent con­fron­tées dans le monde de la den­tis­terie ? Quelles avancées ont été obtenues par le SFCD, le syn­di­cat des femmes chirurgiens-den­tistes ? Au vu de ce qu’elles ont pu vivre, s’estiment-elles fémin­istes aujourd’hui ? Voilà autant de points abor­dés dans cet épisode d’Entre­tien avec un den­tiste, réal­isé en col­lab­o­ra­tion avec le réseau WIN, Woman Implan­tol­ogy Net­work.

Vous estimez-vous chirurgiens-dentistes féministes… ou pas ?

Après avoir expliqué le rôle que leur édu­ca­tion a joué dans leur vie étu­di­ante et pro­fes­sion­nelle, nos inter­venantes répon­dent à une ques­tion pas si sim­ple : estimez-vous être fémin­istes ? Les répons­es ne sont pas for­cé­ment celles que nous pour­rions attendre…

« Moi, je ne suis pas fémin­iste, au con­traire. […] Oui, je veux que les femmes gar­dent leurs droits, mais après, je ne veux pas qu’on arrive à une sit­u­a­tion où on est, juste­ment, des quotas. »

Julie Lamure

« C’est peut-être aujourd’hui, avec mon vécu, que je me rends compte, de par le chemin par­cou­ru, qu’en fait, je suis peut-être une fémin­iste… Mais peut-être pas avec la déf­i­ni­tion qu’on pour­rait don­ner aujourd’hui. »

Hélène Le Hecho

« Le SFCD [syn­di­cat des femmes chirurgiens-den­tistes] a obtenu des choses qui n’étaient pas pour les femmes, mais qui étaient pour leurs enfants et pour leur mari. […] [L’allocation édu­ca­tion] était allouée lorsqu’un homme chirurgien-den­tiste décé­dait, pour ces orphe­lins. Mais quand une femme chirurgien-den­tiste était décédée, son enfant n’avait le droit à rien, ce qui est quand même incroy­able. Il a fal­lu se bat­tre pour qu’il y ait une égal­ité là-dessus. Il a fal­lu se bat­tre aus­si pour qu’il y ait l’ac­com­pa­g­ne­ment veu­vage. C’est-à-dire qu’un homme décédé, sa veuve avait quelque chose, une femme décédée, son con­joint n’avait rien. C’est quand même fou. »

Nathalie Del­phin

Quelle place pour la maternité dans les études et la vie de dentiste ?

Dans cet épisode, j’ai voulu accorder une grande place à l’impact des grossess­es et de la mater­nité dans une car­rière. Par­fois, cela se passe bien… mais pour d’autres, le choix de la parental­ité implique une perte de cor­re­spon­dants et/ou de patients. S’arrêter de tra­vailler et pren­dre un con­gé mater­nité n’est pas tou­jours pos­si­ble… mais lorsqu’il est pris, ça peut aus­si être le moment de se recen­tr­er sur soi.

« Il y a eu une scène assez typ­ique où j’é­tais assise en tailleur, par terre, avec ma fille au sein gauche et moi, en train de pren­dre des notes à droite, au télé­phone, parce que le bio­sta­tis­ti­cien était en train de me don­ner les résul­tats du nom­bre de sujets à inclure. C’est vrai qu’il y a eu des moments quand même compliqués. »

Anne-Gaëlle Chaux

« J’ai accouché le same­di matin et le jeu­di, j’é­tais au cab­i­net. Mon assis­tante n’en est pas revenue. »

Julie Lamure

« En fait, j’ai peut-être prof­ité de ces moments-là […] pour redéfinir mes objec­tifs. À chaque fois, parce que j’ai eu qua­tre enfants, ça a été une for­mi­da­ble occa­sion de pren­dre du recul sur moi-même, du recul sur ce que j’avais envie de faire, etc. »

Hélène Le Hecho

« Au niveau du cab­i­net et du con­gé mater­nité, le pre­mier, je me suis arrêtée deux mois. J’ai per­du des cor­re­spon­dants qui ont préféré aller voir les gens qui étaient plus disponibles. […] On me l’a dit claire­ment. […] J’é­tais en col­lab­o­ra­tion à l’époque. Ma col­lab­o­ra­trice elle-même, quand je suis rev­enue au bout d’un mois, m’a dit : « Ben en fait, je n’ai plus besoin de toi, je sais faire des implants, fais ton carton ».

Julie Lamure

La mater­nité rime sou­vent avec réflex­ions déplacées et argu­ments dou­teux quant à la capac­ité de tra­vail de la femme, qu’elle soit chirurgien-den­tiste ou non.

« Par exem­ple, pour mon con­cours d’assistante, le chef de ser­vice, la pre­mière ques­tion qu’il m’a posée pour le con­cours, c’est : « Est-ce que vous êtes enceinte ? ».

Julie Lamure

« Pour être tout à fait sincère, moi, pen­dant cette péri­ode-là, j’ai dû faire deux crédits, à deux repris­es, pour les qua­tre enfants. Pour les deux pre­miers, je me suis arrêtée un mois et demi, mais pour les deux derniers, j’ai voulu m’ar­rêter qua­tre mois, ce qui ne me paraît pas non plus être extra­or­di­naire. J’ai été oblig­ée d’emprunter un petit peu pour cou­vrir cette péri­ode de façon sere­ine et pas être stressée avec l’argent. »

Hélène Le Hecho

Entre les études et le tra­vail, il est même fréquent de se deman­der claire­ment com­ment on va réus­sir à avoir des enfants. Une fois que la grossesse est là, la ques­tion de l’annonce peut sérieuse­ment se pos­er, elle aussi.

« Je me sou­viens qu’au pro­ba­toire, nous étions majori­taire­ment des filles et c’é­tait la grande ques­tion récur­rente. Si nous avions le con­cours et donc qua­tre ans d’é­tudes sup­plé­men­taires, com­ment allions nous faire pour avoir des enfants ? »

Flo­rence Etcheverry

« Je l’ap­pelle : « Tu t’es cassé le bras ? »… « Non, j’ai men­ti, en fait, je suis enceinte, mais ça passe mieux auprès des patients. Je dis que je me suis cassé le bras. Comme ça, ils savent que je vais revenir bien­tôt. Si je dis que je suis enceinte, ils se dis­ent que je vais poupon­ner et que je serai moins présente pour eux. ». Ça m’avait vrai­ment sur­prise qu’elle dise ça. Après, quand je suis rev­enue de ma pre­mière grossesse, j’ai per­du un de mes cor­re­spon­dants, etc. Je me suis dit que, peut-être, c’est elle qui avait rai­son, je n’aurai peut-être pas dû le dire. Et c’est vrai que ma deux­ième grossesse, ben je ne l’ai pas dit. »

Julie Lamure

Quel équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle ?

C’est tou­jours dif­fi­cile de trou­ver un équili­bre entre une vie pro­fes­sion­nelle dans laque­lle on a envie de s’investir et une vie per­son­nelle et famil­iale épanouie. Même quand on est en accord avec ces choix et que les enfants com­pren­nent, la cul­pa­bil­ité peut facile­ment arriver.

« J’ai tou­jours été très hon­nête avec elle […] et elle com­pre­nait bien les choses. Quelque part, je me dis­ais aus­si que c’est vrai que je suis moins à la mai­son, mais que c’est, entre guillemets, une forme d’éducation. Lui expli­quer pourquoi je fai­sais tout ça, c’était aus­si, entre guillemets, lui mon­tr­er un exem­ple par­mi d’autres. »

Marie-Pierre Ven­tri­bout

« Oui, il y a eu des choix à faire, il y a eu, par­fois, de la cul­pa­bil­ité. […] La maîtresse me voit arriv­er et me dit : « Vous êtes qui ? ». Ça a été l’élec­tro­choc. […] J’ai effec­tive­ment mod­i­fié mon plan­ning pro­fes­sion­nel pour pou­voir aller une fois par semaine chercher ma fille à l’école. »

Anne-Gaëlle Chaux

« J’ai tou­jours essayé de garder cette com­mu­ni­ca­tion avec elle, mais c’est vrai que j’ai beau­coup, beau­coup cul­pa­bil­isé, énormément. »

Marie-Pierre Ven­tri­bout

« Le sen­ti­ment de cul­pa­bil­ité était loin d’être per­ma­nent… De temps en temps peut-être. Après, c’est vrai que le peu de temps que je pas­sais avec mes filles, j’es­sayais vrai­ment d’être com­plète­ment disponible pour elles. C’est quelque chose que ma fille m’a dit aussi. »

Anne-Gaëlle Chaux

Heureuse­ment, il est pos­si­ble de tra­vailler pour que cha­cune des sphères impor­tantes de notre vie ait sa place.

« L’équilibre entre la vie per­son­nelle et la vie pro­fes­sion­nelle, c’est vrai qu’il est assez dif­fi­cile à trou­ver. Du temps pour moi, claire­ment, j’en ai très peu. […] La vie de cou­ple, c’est pareil. […] J’es­saye de ne pas tra­vailler à la mai­son, ou très peu, en tout cas. Mais oui, c’est un com­bat d’or­gan­i­sa­tion, de ne pas tra­vailler à la maison. »

Anne-Gaëlle Chaux

« Pour moi, une des clés, par exem­ple pour réori­en­ter les femmes ou pour leur per­me­t­tre de con­tin­uer leur ascen­sion, c’est vrai­ment d’avoir des out­ils qui per­me­t­tent de faire ce qu’on appelle du step by step. « Là, j’ai décon­nec­té pen­dant un moment, d’accord. Mais là, j’ai envie d’y revenir. Pourquoi ne pas me chal­lenger un peu ? ». »

Hélène Le Hecho

J’espère que cet épisode vous aura apporté du sou­tien ou un éclairage inspi­rant sur le lien entre la mater­nité et une car­rière épanouie en implan­tolo­gie. Dans le prochain et dernier épisode de cette série, il sera ques­tion de penser le futur de l’implantologie au féminin. Si vous avez aimé notre tra­vail, n’oubliez pas de vous inscrire à ma newslet­ter men­su­elle. Elle vous per­me­t­tra de con­naître les actu­al­ités du pod­cast et de décou­vrir des bonus en lien avec la thé­ma­tique du mois.

Je remer­cie :

  • Pauline Bus­si @lesonlibre pour son montage ;
  • Guil­laume Denaud pour l’illustration ;
  • Maxime Wathieu pour la com­po­si­tion du générique et de l’habillage sonore ;
  • Qat­si Marchan­deau pour la rédac­tion de l’article ;
  • Hélène Le Hecho, Julie Lamure, Anne-Gaëlle Chaux et Marie-Pierre Ven­tri­bout pour leur témoignage ;
  • Muriel Salle et Nathalie Del­phin pour leur expertise.

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