Mon voyage à travers l’argent en dentisterie : épisode 7 Au-delà du libéral : choisir ses valeurs dans le soin

Dans ce nouvel épisode de notre série sur l'argent dans la pratique dentaire, nous discutons avec Jérémie Bazart de la rémunération à l'acte, du modèle libéral et de la conciliation entre soin et rentabilité. À travers son expérience dans le salariat et son travail au sein de structures publiques, Jérémie partage ses réflexions sur la manière dont le modèle libéral place souvent les dentistes dans une posture d’entrepreneurs, au détriment de l’essence du soin.

L’argent et la san­té sem­blent par­fois for­mer un duo com­plexe et con­tra­dic­toire, par­ti­c­ulière­ment dans le monde de la den­tis­terie. Com­ment con­cili­er la rentabil­ité d’un cab­i­net avec la mis­sion pre­mière du soignant, celle de pren­dre soin des patients ? Dans cet épisode, j’ai eu le plaisir de dis­cuter avec Jérémie Bazart, prati­cien salarié, qui nous livre son regard sur les défis financiers aux­quels font face les den­tistes, qu’ils soient libéraux ou salariés. Nous abor­dons égale­ment l’im­por­tance d’of­frir aux jeunes prati­ciens des mod­èles d’ex­er­ci­ce diver­si­fiés, afin qu’ils puis­sent choisir une voie pro­fes­sion­nelle alignée avec leurs valeurs.

« Moi, je vois des gens qui ont des besoins,
et puis je me dis, allez, j’y vais.
Peu importe com­bi­en ça coûte, ce n’est pas mon sujet.
C’est le paiement à l’acte que je remets en ques­tion,
sur la façon de soign­er les gens.
Je pense que le paiement à l’acte est dif­fi­cile­ment com­pat­i­ble avec un soin de qual­ité. »

Dr Jérémie Bazart

1. La rémunération à l’acte : un modèle en question

Le modèle libéral et la posture d’entrepreneur

Dans l’ex­er­ci­ce libéral, la rémunéra­tion à l’acte est au cœur du mod­èle économique. Chaque soin, chaque con­sul­ta­tion, chaque inter­ven­tion est fac­turée indi­vidu­elle­ment. Jérémie partage ses réflex­ions sur cette méth­ode de rémunéra­tion, qui selon lui, crée une dynamique de rentabil­ité incom­pat­i­ble avec l’essence du soin médi­cal. Pour lui, être den­tiste ne devrait pas se lim­iter à être un chef d’en­tre­prise.

Des limites pour la qualité des soins ?

La rémunéra­tion à l’acte, bien qu’elle encour­age la pro­duc­tiv­ité, peut par­fois faire pass­er la rentabil­ité avant la qual­ité des soins. Jérémie évoque sa con­vic­tion que ce sys­tème, bien qu’adopté par la majorité des den­tistes libéraux, pousse cer­tains à con­sid­ér­er la pra­tique comme une sim­ple ges­tion d’entreprise, où l’objectif est de max­imiser les prof­its plutôt que de garan­tir des soins de qualité.

2. Salariat : une alternative plus sereine ?

La stabilité financière et professionnelle

À l’in­verse du mod­èle libéral, Jérémie présente les avan­tages du salari­at en milieu hos­pi­tal­ier ou au sein de struc­tures publiques. Il béné­fi­cie d’une rémunéra­tion fixe, basée sur une grille salar­i­ale, et de journées de tra­vail bien struc­turées. Ce mod­èle per­met de sta­bilis­er les revenus et de se con­cen­tr­er pleine­ment sur les soins, sans la pres­sion per­ma­nente de la rentabilité.

Un choix qui n’est pas toujours valorisé

Mal­gré les avan­tages du salari­at, Jérémie souligne que ce mod­èle reste peu val­orisé dans le milieu den­taire. Les étu­di­ants, lors de leur for­ma­tion, se voient sou­vent présen­ter le mod­èle libéral comme la seule véri­ta­ble voie de réus­site, lais­sant peu de place à l’exploration d’autres formes d’exercice professionnel.

3. La formation des dentistes : un besoin de diversification

Offrir des choix éclairés aux étudiant·es

Une grande par­tie de la dis­cus­sion porte sur la for­ma­tion des jeunes praticien·nes. Jérémie et moi parta­geons des doutes sur le fait que l’université ait un rôle à jouer dans la for­ma­tion des étudiant·es à gér­er une entre­prise. Cette tâche sem­ble sou­vent incom­pat­i­ble avec la mis­sion pre­mière de l’université, qui est de for­mer des soignant·es, et non des chef·fes d’en­tre­prise. Pour­tant, l’aspect entre­pre­neur­ial du méti­er est une réal­ité incon­tourn­able pour les libéraux. En plus de cette lacune, peu d’étudiant·es sont exposés à des mod­èles d’ex­er­ci­ce alter­nat­ifs, comme le salari­at en cen­tre de san­té ou en milieu hos­pi­tal­ier. Ce manque de diver­sité dans la for­ma­tion con­duit à un choix lim­ité et par­fois mal infor­mé lorsqu’il s’ag­it d’en­tr­er dans la vie professionnelle.

Le compagnonnage : un modèle à encourager 

Pour que les futurs den­tistes puis­sent faire un choix véri­ta­ble­ment éclairé, il est cru­cial de diver­si­fi­er les expéri­ences pen­dant leur for­ma­tion. L’idée de met­tre en place un sys­tème de com­pagnon­nage, où les étudiant·es pour­raient être salarié·es dans des cen­tres de san­té, encadrés par des prati­ciens expéri­men­tés, a émergé. Ce mod­èle per­me­t­trait non seule­ment de répon­dre à des besoins en san­té publique, mais aus­si d’offrir aux étudiant·es une expéri­ence pra­tique et encadrée dans des envi­ron­nements variés.

4. Trouver l’équilibre entre soin et rentabilité

Un équilibre à atteindre

Au fil de l’épisode, nous revenons sou­vent sur ce défi cen­tral : com­ment con­juguer soin de qual­ité et via­bil­ité économique ? Que ce soit dans le mod­èle libéral ou en tant que salarié, la rentabil­ité ne doit pas devenir un objec­tif en soi. Les jeunes praticien·nes doivent être encour­agés à trou­ver leur pro­pre voie, où l’argent reste un out­il pour exercer leur méti­er, et non une final­ité.

Un métier de soin, pas d’entrepreneur

En con­clu­sion, nous avons réaf­fir­mé l’importance de rap­pel­er aux den­tistes, dès leur for­ma­tion, qu’ils choi­sis­sent un méti­er de soin, et non une car­rière d’entrepreneur. L’en­jeu est d’orienter la pra­tique vers un équili­bre sain, où le/la patient·e et la qual­ité des soins restent au cen­tre des préoc­cu­pa­tions, tout en garan­tis­sant la péren­nité économique de l’activité.

Conclusion

Cet épisode avec Jérémie Bazart a per­mis de jeter un regard lucide et cri­tique sur les dif­férentes formes d’exercice du méti­er de den­tiste. La ques­tion de la rémunéra­tion et de la rentabil­ité reste un sujet cen­tral, qu’il s’agisse de l’exercice libéral ou du salari­at. Nous avons égale­ment souligné l’importance d’offrir aux jeunes praticien·nes une for­ma­tion diver­si­fiée, où l’accompagnement et le com­pagnon­nage occu­pent une place centrale.

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La série sur l’argent se con­clu­ra dans le prochain épisode, où nous dis­cuterons d’éthique avec Flo­ra Bas­tiani. Restez connecté·es !

Je remer­cie chaleureusement :

  • Pauline Bus­si @lesonlibre pour son montage ;
  • Camille Cau­vez pour l’illustration ;
  • Maxime Wathieu pour la com­po­si­tion du générique et de l’habillage sonore ;
  • Le doc­teur Jérémie Bazart d’avoir partagé son expéri­ence et ses con­vic­tions sur la profession !

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